Je ne sais pas si vous vous souvenez de la remarque intéressante, comme toujours, de Marine sur le bidon bedonnant de nos amis ?
Marine en Guyane écrit: Et concernant le ventre ballonné des nasiques, serait-ce aussi à cause des feuilles qu'ils ingèrent et qui fermentent dans leur organisme car ils ne les assimilent pas entièrement ?
Eh oui, ce bidou (à l'air doux) intrigue. Dean nous explique que les nasiques ont deux estomacs comme les vaches. Étonnant, non ? Bon, ne chipotons pas, la Vache a quatre estomacs, rumen, réseau, caillette, feuillet. Et Monsieur Nasique n'a pas vraiment deux estomacs bien distincts comme notre amie laitière. Mais globalement, "c'est pas faux" !
Le Nasique dispose d'une poche avant-estomac (enlarged sacculated forestomach) et d'une très riche population bactérienne. Comme chez les Ruminants, les bactéries découpent la cellulose en sucres assimilables par l'organisme, s'en nourrissent, et augmentent leur population, fabriquant ainsi des protéines et des lipides dont notre ami tire profit. Notre ami qui ne pousse pas l'imitation jusqu'à ruminer, à savoir faire remonter le bol alimentaire pour une mastication aux petits oignons, non, mais comme les Ruminants, son travail de digestion lui impose de longues périodes de repos, c'est bien simple, dans la journée, ou il mange, ou il digère en paix.
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A part quelques termites, et pas n'importe lesquels, mais à Sabah préférentiellement ou exclusivement l'espèce
Microcerotermes distans, le Nasique ne mange que des végétaux, principalement des jeunes feuilles, mais aussi des fleurs, des graines, des fruits, verts, de l'écorce (et des nids de termites). Son alimentation riche en eau, souvent couverte d'eau de pluie et de plus l'eau métabolique résultant principalement de l'oxydation des glucides et lipides, lui permettent de boire rarement. Les feuilles entrent pour les deux tiers dans sa nourriture, les fruits pour un quart et le petit reste se répartit entre graines, écorces, etc.
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Les bactéries lui permettent aussi de manger des plantes qui seraient toxiques sans leur travail dévoué de détricotage des toxines. Pourquoi pas de fruits mûrs, riches en sucres qui seraient certainement appréciés de la flore bactérienne, heureuse de ne pas avoir à se tronçonner de la cellulose ? Eh bien justement, la prolifération bactérienne qui en résulterait avec toutes ses fermentations risquerait de provoquer une météorisation, un gonflement possiblement mortel de l'estomac...
À Sukau, les scientifiques ont recensé dans la consommation du Nasique 188 plantes, réparties en 127 genres et 55 familles.